Fraus omnia corrumpit est un adage juridique latin, qui signifie « la fraude corrompt tout ».
Nous venons de finir un dossier dans lequel nous avons notamment mis en avant la fraude à l’activité partielle d’un employeur qui utilisait cette indemnité comme variable d’ajustement pour maintenir son chiffre d’affaires en rapport avec celui de l’année précédente, sans lien réel avec le nombre d’heures d’une partie de ses salariés placés en activité partielle.
Pire, pour l’un d’entre eux, il effectuait plus de 200 heures de travail par mois. Vous comprenez dès à présent qu’il ne peut y avoir d’activité partielle dans de telles circonstances.
Mais que risquent les employeurs qui fraudent ou tentent de frauder ?
Dans un premier temps, il convient de définir l’activité partielle.
- L’activité partielle c’est quoi ?
Le salarié qui est placé en activité partielle par son employeur voit son contrat de travail suspendu (art. L.5122-1 du Code du travail).
Précisons également que la cessation d’activité doit être temporaire et collective. Elle doit concerner l’entreprise ou un atelier, un service, une unité de production. Elle ne peut concerner un seul individu sauf s’il représente l’entreprise, un service, un atelier … à lui tout seul. (Cass. soc., 19 juil. 1995 n° 91-45.676 PFR : RJS 10/95 n° 1039)
La réduction collective de l’horaire de travail peut toutefois être appliquée individuellement et par roulement par unité de production (Circ. DGEFP 12 du 12 juillet 2013).
Durant cette période, le salarié ne peut pas travailler pour son entreprise.
Il n’a même pas à se tenir à sa disposition.
Mais lors sa période d’activité partielle, l’employeur peut lui demander de travailler en tout ou partie de sa durée.
Dans ce cas, l’entreprise ne demande pas d’indemnité d’activité partielle à l’administration lors de sa déclaration en fin de mois pour les heures travaillées sur la période.
L’article L.8211-1 pris en son 6° du Code du travail dispose qu’est constitutif de travail illégal, la fraude ou fausse déclaration prévue à l’article L.5124-1 du Code du travail.
En outre, au visa de l’article L.5124-1 du Code du travail, le fait de bénéficier ou de tenter de bénéficier frauduleusement des allocations mentionnées à l’article L. 5122-1 du Code du travail, c’est-à-dire des allocations concernant l’activité partielle, est puni des peines prévues à l’article 441-6 du Code pénal, c’est-à-dire de 2 ans d’emprisonnement et 30 000€ d’amende.
Et au visa de l’article 441-10 du Code pénal, pour la personne physique à l’origine de la fraude, elle est punie de :
« 1° L’interdiction des droits civiques, civils et de famille suivant les modalités prévues par l’article 131-26 du Code pénal ;
2° L’interdiction, suivant les modalités prévues par l’article 131-27 du Code pénal, soit d’exercer une fonction publique ou d’exercer l’activité professionnelle ou sociale dans l’exercice ou à l’occasion de l’exercice de laquelle l’infraction a été commise, soit d’exercer une profession commerciale ou industrielle, de diriger, d’administrer, de gérer ou de contrôler à un titre quelconque, directement ou indirectement, pour son propre compte ou pour le compte d’autrui, une entreprise commerciale ou industrielle ou une société commerciale. Ces interdictions d’exercice peuvent être prononcées cumulativement ;
3° L’exclusion des marchés publics ;
4° La confiscation de la chose qui a servi ou était destinée à commettre l’infraction ou de la chose qui en est le produit, à l’exception des objets susceptibles de restitution (en clair le remboursement des sommes obtenues indument). »
A cela s’ajoute le travail dissimulé avec une indemnité forfaitaire de 6 mois de salaire au profit du salarié en cas de rupture de son contrat de travail mais également le fait que le contrevenant encourt des amendes et peines de prison (3 ans d’emprisonnement et 45 000 € d’amende – art. L. 8224-1 du Code du travail), et en tant que personne physique coupable de l’infraction de travail dissimulé, elle encourt les peines complémentaires suivantes (c. trav. art. L.8224-3) :
«1° L’interdiction, pour une durée de cinq ans au plus, d’exercer, directement ou par personne interposée, l’activité professionnelle dans l’exercice ou à l’occasion de l’exercice de laquelle l’infraction a été commise selon les modalités prévues par l’article 131-27 du code pénal ;
2° L’exclusion des marchés publics pour une durée de cinq ans au plus ;
3° La confiscation des objets ayant servi directement ou indirectement à commettre l’infraction ou qui ont été utilisés à cette occasion, ainsi que de ceux qui en sont le produit et qui appartiennent au condamné ;
4° L’affichage du jugement aux frais de la personne condamnée dans les conditions prévues à l’article 131-35 du code pénal et son insertion, intégrale ou par extraits, dans les journaux qu’elle désigne. Ces frais ne peuvent excéder le montant maximum de l’amende encourue ;
5° L’interdiction, suivant les modalités prévues par l’article 131-26 du code pénal, des droits civiques, civils et de famille. »
Mais ce n’est pas tout, le délit d’escroquerie voire même la tentative d’escroquerie (art. 313-1 et 3 du Code pénal) peut être également retenu en cas de fraude à l’activité partielle, dès lors que l’élément intentionnel de la fraude est démontré.
L’escroquerie s’entend du fait que par des manœuvres frauduleuses, il y a tromperie d’une personne physique ou morale (en l’occurrence l’Etat) aux fins de la déterminer à son propre préjudice à remettre des fonds (l’indemnité de l’activité partielle).
L’escroquerie comme la tentative d’escroquerie est punie de cinq ans d’emprisonnement et de 375 000€ d’amende.