L’inaptitude physique d’origine non professionnelle – L’absence de consultation du CSE …

  • Historiquement

Seule la consultation des représentants du personnel pris en la forme des délégués du personnel pour recueillir leur avis sur les possibilités de reclassement du salarié inapte était nécessaire pour toute inaptitude d’origine professionnelle (maladie professionnelle ou accident du travail). (Art. L.1226-10 ancien du Code du travail)

A noter que cet article existe toujours. La consultation se portant aujourd’hui au niveau du CSE, c’est-à-dire du Comité Social et Economique.

C’est pourquoi le défaut de consultation sur les possibilités de reclassement, sauf à démontrer d’un procès-verbal de carence (Cass. soc., 11 mai 2016, n° 14-12169) ou d’un effectif insuffisant pour avoir des représentants du personnel, se traduit :

1/ par une indemnité prévue par l’article L.1226-15 du Code du travail égale au moins à 6 mois de salaire. (Cass. soc., 7 mai 1997, n° 94-41697)

2/ par un délit d’entrave (Cass. crim., 26 janv. 1993, n° 89-85389)

Et cette consultation s’applique, peu importe que l’employeur estime qu’il lui est impossible de reclasser le salarié (Cass. soc., 21 févr. 1990, n° 88-42.125 ; 30 oct. 1991, n° 87-43.801).

Toutefois, le législateur est venu nuancer ce principe par la Loi travail de 2016 pris en son article L.1226-12 du Code du travail puisque l’obligation de cette consultation n’est plus exigée dès lors que l’avis d’inaptitude du médecin du travail mentionne expressément « que tout maintien du salarié dans l’emploi serait gravement préjudiciable à sa santé ou que l’état de santé du salarié fait obstacle à tout reclassement dans l’emploi ». (Art. L.1226-12 du Code du travail)

Précédemment, l’obligation de reclassement érigée en principe général du droit (CE 2 oct. 2001, n° 227868) imposait à l’employeur de rechercher un poste et d’établir la réalité et le sérieux de ses recherches, même lorsque le salarié était inapte à tous postes dans l’entreprise.

  • L’apport de la Loi travail 2016 modifié par les ordonnances 2017-1386 du 22 sept. 2017 (art.4) et 2017-1718 du 20 déc. 2017 (art.1)

Le législateur a étendu l’obligation de consultation des membres du CSE aux inaptitudes ayant une origine non professionnelle (art. L.1226-2 du Code du travail) afin de recueillir leur avis. La formule employée est la suivante :

« Cette proposition prend en compte, après avis du comité social et économique lorsqu’il existe, les conclusions écrites du médecin du travail et les indications qu’il formule sur les capacités du salarié à exercer l’une des tâches existantes dans l’entreprise. Le médecin du travail formule également des indications sur la capacité du salarié à bénéficier d’une formation le préparant à occuper un poste adapté. »

Toutefois, ce texte n’est pas applicable dès lors que le médecin du travail indique dans l’avis d’inaptitude, la mention expresse « que tout maintien du salarié dans un emploi serait gravement préjudiciable à sa santé ou que l’état de santé du salarié fait obstacle à tout reclassement dans un emploi » (art. L.1226-2-1 du Code du travail).

Dans ce cas, l’obligation de reclassement « est réputée satisfaite » (même article).

  • La décision de la Cour de cassation du 30 septembre 2020 (n° 19-11974)

Pour la première fois depuis l’apport de la Loi travail 2016 et de ses ordonnances, les Hauts magistrats ont eu à se prononcer sur l’absence d’avis des représentants du personnel sur les possibilités de reclassement d’un salarié ayant une inaptitude physique d’origine non professionnelle.

En l’espèce, un conducteur longue distance était placé en inaptitude à l’issue d’un examen du médecin du travail en date du 10 mars 2017, puis licencié pour inaptitude physique d’origine non professionnelle et impossibilité de reclassement.

Seulement l’employeur a omis de consulter les délégués du personnel (le CSE n’existait pas encore – ordonnance n° 2017-1386 du 22 décembre 2017).

Cet arrêt précise pour la première fois et de manière très claire que l’absence de consultation par l’employeur des représentants du personnel rend le licenciement sans cause réelle et sérieuse.

« L’obligation de reclassement est réputée satisfaite lorsque l’employeur a proposé un emploi, dans les conditions prévues à l’article L. 1226-2, en prenant en compte l’avis et les indications du médecin du travail »

Et que :

« la méconnaissance des dispositions relatives au reclassement du salarié déclaré inapte consécutivement à un accident non professionnel ou une maladie, dont celle imposant à l’employeur de consulter les délégués du personnel, prive le licenciement de cause réelle et sérieuse. »

Pour toutes questions, vous pouvez nous contacter.

Fabien THOMAS
Directeur de la société ICMP
06 62 65 90 48

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