L’absence de motif du CDD ou son imprécision, quelles conséquences?

  • De plus en plus d’embauches en CDD

De plus en plus d’embauches se font en CDD. En 2017 cela concernait près de 9 contrats du 10.

Dans les entreprises de plus de 50 salariés, le taux d’embauche en CDD a été multiplié par 4 depuis 1993. (Source DARES) (publication LCI)

  • L’obligation de préciser le motif du CDD

Nous nous proposons ici d’étudier l’obligation d’indiquer l’objet du CDD dans le contrat de travail.

Préalablement, il convient de rappeler que le recours au CDD est strictement encadré par la Loi (art. L.1242-2 du Code du travail) puisqu’un CDD ne peut être conclu que pour une tâche précise et temporaire.

Sont donc autorisé, les CDD conclus pour :

– le remplacement d’un salarié en cas d’absence,

– le remplacement du chef d’entreprise en cas d’absence,

– l’accroissement temporaire de l’activité de l’entreprise,

– l’emploi saisonnier (exécution de travaux temporaires par nature),

– le recrutement des ingénieurs et cadres en vue de réaliser un objet défini,

– la réalisation les vendanges,

– l’emploi des seniors ou des salariés agricoles âgés.

En outre, le CDD est un contrat de travail nécessairement écrit au sein duquel doit être obligatoirement précisé son motif. A défaut, il est réputé conclu pour une durée indéterminée. (Art. L.1242-12 du Code du travail)

Il faut donc comprendre cet article L.1242-12 sous 2 aspects, une obligation d’indiquer le motif de recours du CDD (1) mais aussi une indication du motif suffisamment précise (2).

  • (1) L’absence de motif du recours au CDD

L’indication du motif constitue une formalité substantielle dont le défaut est sanctionné au même titre que l’absence d’écrit (Cass. soc., 3 avril 1990, n° 87-40353 ; 12 oct. 1994, n° 91-41850) c’est-à-dire par la requalification à durée indéterminée (art. L.1245-1 du Code du travail) et pour laquelle le Conseil de prud’hommes alloue une indemnité qui ne peut inférieure à un mois de salaire (art. L.1245-2 du Code du travail). L’affaire étant d’ailleurs portée directement devant le bureau de jugement.

  • (2) L’indication d’un motif imprécis vaut absence de motif

L’énonciation du motif du CDD est fixée par les termes du contrat de telle sorte qu’en cas de contestation, l’employeur ne puisse pas s’appuyer sur d’autres éléments pour indiquer le motif, qui nous l’avons vu doit être précis. (Cass. soc., 27 févr. 2002, n° 00-40735)

« le contrat à durée déterminée doit comporter la définition précise de son motif ; que cette énonciation fixe les limites du litige au cas où la qualification du contrat est contestée »

Ainsi, ne répond pas à cette exigence de précision, le motif du contrat de travail à durée déterminée qui indique qu’il était conclu pour :

« la commercialisation des stands du salon CITEXPO » (Même arrêt)

« une opération de télé vente et permanence téléphonique » (Cass. soc., 9 juin 2017, n° 15-28599)

« la réorganisation du service transport » (Cass. soc., 9 juin 2017, n° 15-28599)

« foires » sans autre précision (Cass. soc., 29 nov. 2007, n° 06-41847)

Cette exigence de précision permet de s’assurer de la légitimité du recours au CDD puisque la forme normale et générale de la relation de travail est à durée indéterminée (art. L.1221-2 du Code du travail).

Ainsi, l’imprécision du motif du CDD vaut une absence de précision et fait encourir la requalification à durée indéterminée.

  • Cas du référé

Devant l’engorgement des tribunaux, il n’est pas rare de voir des jugements rendus dans un délai supérieur à un mois. Raison pour laquelle, il est possible de demander au Juge des référés d’ordonner le maintien provisoire à son poste du salarié en CDD jusqu’à ce que les juges du fond rendent leur décision. Cela suppose que le contrat ne soit pas encore arrivé à son terme (Cass. soc., 8 mars 2017, n° 15-18560) puisqu’aux termes de l’article R.1455-6 du Code du travail, la formation de référé peut toujours prescrire les mesures de remise en état qui s’imposent pour prévenir un dommage imminent ou faire cesser un trouble manifestement illicite.

« Constitue un dommage imminent, la perte de l’emploi par l’effet de la survenance du terme, durant la procédure, du contrat à durée déterminée toujours en cours au moment où le juge des référés statue, ce dommage étant de nature à priver d’effectivité le droit pour le salarié de demander la requalification d’un contrat à durée déterminée irrégulier en contrat à durée indéterminée afin d’obtenir la poursuite de la relation contractuelle avec son employeur »

  • Requalification du CDD en CDI après le terme du contrat – conséquences

En cas de rupture de la relation de travail dans le cadre de la fin du CDD, le salarié sera alors fondé à obtenir :

– des dommages et intérêts pour rupture abusive du contrat par la seule survenance de l’échéance du terme (Cass soc., 3 juin 2009, n° 08-41037art. L.1235-3 du Code du travail;

– et selon l’ancienneté, une indemnité compensatrice de préavis égale au salaire (y compris les congés payés) qu’aurait dû percevoir le salarié s’il avait effectué son préavis de licenciement (Cass. soc., 14 fév. 2007, n° 04-48338) et une indemnité légale de licenciement (art. L.1234-9 du Code du travail) ou conventionnelle si cette dernière est plus favorable.

Pour toutes questions, vous pouvez nous contacter.

Fabien THOMAS
Directeur de la société ICMP
06 62 65 90 48 – 09 53 19 02 17

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